Un mec parfait

Nos vacances à Blonville

Samedi : J1

Réveil 8 heures à Paris. Valises bouclées, Thierry charge sa Polo tandis que je lambine au lit.
Réveil Marie, la seule à petit déjeuner, on embarque, deux heures et quart de route plutôt agréables : pas de bouchons, 110 km/h, Thierry m'amuse, il évite les radards avec une dextérité de pro, musique, clim', Marie magnifique à l'arrière s'est maquillé les yeux, deux traits de kool bleu et lèvres nacrées roses. Très sage, ses ongles peints nacrés, sandales plates, discrète et belle, contente, très sage.
Musique, vitesse mais on s'en rend pas compte, péages, trajet très cool, autoroute, ligne droite, musique, sérénité.

Nous arrivons à 14 heures. La maison est vachement jolie. Spacieuse, 80 Mètres carré, très bien tenue.
Le mobilier un peu vieillot : canapé et fauteuils en velours moutarde, chaise en osier et bois Louis XV, commodes stylées empire, rideaux fleuris... Ca dépayse !
TOUT propre, salle de bain nickel, grande cuisine avec lave-vaisselle, nombreux rangements, plein de détails très fignolés, notamment les tapis d'orient au sol et les luminaires assortis. Des guéridons aussi, recouverts de jolis napperons, une télé écran plasma et un bar plein dans le meuble TV...
Luxueux, bien pensé, rutilant et accueillant.

Je jubile.

Nous déjeunons à Blonville sitôt la Polo déchargée (cf photos). Sardines à l'huile pour Thierry et filet de boeuf/ patates à l'ail pour Marie et moi.

La plage est à trois minutes à pied, le temps clément, un peu ventu, mais ensoleillé.
Marie se lance la première en mer.
Elle s'éclate deux bonnes heures dans le roulis des vagues. Thierry la rejoint très vite, j'attends de digérer puis tente la Manche.
Pas très longtemps, elle est glacée ! Les vagues ont bientôt raison de la faiblesse de mes cuisses, elles m'entrainent malgré moi, me bousculent, m'immergent jusqu'aux cheveux. Trop drôle !
Après baignade, Thierry s'endort sur le transat loué pour la journée (cf photos). Marie ne se lasse pas, s'éclate à donf dans l'océan bleu blanc, moi oui, trop fragile physiquement pour abuser de ce monstrueux adversaire.
Fragile, maigrelette, mais satisfaite cependant, l'impression de revivre, de respirer, de m'envoyer en l'air, après les évènements marquants de ces derniers mois.

Plus tard, les courses dans le quartier et une broquante avec Thierry. Il m'offre quatre miniatures en porcelaine, j'y placerai une rose, ou un oeillet.
Des soliflores colorés, anciens, pas ébréchés, jolis.
Les valises ont été vidées de nos vêtements, sagements rangés dans les nombreux tiroirs et armoires.
Cette petite maison est vraiment agréable.
Luxe, calme, et volupté.

Ce soir, pour le diner : pizzas
(Que Thierry va chercher chaudes chez le pizzaiollo du coin de la rue).

Dimanche 9 août : J 2

Rien ne va plus !
La nuit à été particulièrement éprouvante.
On avait pas de drap house pour notre lit, Thierry s'est donc servi du drap du dessus pour ne pas salir le matelas, alors on s'est retrouvés sans drap du dessus.
Très chiant de dormir directement sous la couverture en laine rèche, la peau à vif because le soleil !
Je n'y parvenais pas, je me suis donc glissée dans le grand lit de Marie.
Qui m'a bousculée !
Endormie de suite, elle m'a réveillée à coups de pied et poing, pour m'éjecter de là, et dans mon demi sommeil, j'ai cru que c'était Thierry qui me molestait !
Bonjour la solidarité entre nanas !
Bonjour les sentiments que j'éprouve pour mon jules !
Ainsi virée, j'ai du rejoindre notre lit à contre-coeur.

Mauvaise humeur au réveil, sale temps, impossible de se baigner.
On avait quelques courses à faire en ville : acheter un Scrabble, un cahier, et surtout un drap house.
On s'est donc rendus à Deauville et j'ai trouvé Thierry très con toute la balade.
Du genre : à propos du drap house " De toutes façons, j'en aurai besoin une fois installé CHEZ MOI, dans deux mois."
Et de répéter cette phrase une bonne dizaine de fois !
L'idée de s'installer seul semble terriblement le contrarier, comme un échec perso, mais je reste sur mes positions : Je ne veux plus JAMAIS d'homme à demeure.
Même Sarko, je n'en voudrais pas.
Vivre avec un homme est trop contraignant. Ils sont tous fachos et machos, et Thierry plus qu'un autre.
A bientôt cinquante ans, je n'ai plus l'âge d'obéir.
Je ne suis plus une petite fille et j'ai de toutes façons toujours détesté qu'on m'impose quoique ce soit.

Le repas de midi, au "Pirate" de Deauville a été délicieux : Melon/parme, Lieu/patates à l'ail, carpaccio d'ananas.

Mais je n'avais décidément pas le moral :
- Très mal dormi
- Mon fils Mathieu adorable au tel la veille du départ, qui restait cohérent dans ses propos mais parlait d'une voix ralentie, il annonnait, ça m'avait bouleversée. Il voulait partir en vacances, le pôvre !
Comme j'ai pitié de lui et comme je souffre !
- Et mes soucis parisiens : la BNP a refusé les prélèvements de mes deux mutuelles santé juste avant mon départ. Je trouve cela très grave, car s'il nous arrive le moindre pépin, à Marie ou à moi, plus de remboursement et mes dettes s'amplifient.
Comme elle a également refusé mon TIP France Telecom, ma principale ligne tel a été coupée.

Donc, pour résumer :
-Je n'ai plus de père (Alzheimer)
-Je n'ai plus de Mathieu (Interné)
-Je n'ai plus de boulot (RMIste)
-Je n'ai plus de tel, ni d'assurance santé
-J'ai perdu 50% de mes rentrées d'argent
-Mon appart : depuis que Thierry s'y est installé, puisque je ne pouvais plus le payer, est devenu un VRAI TAUDIS surbondé.
Or, j'y passe la majorité de mon temps : déprimant !

Ma situation globale s'est très nettement détériorée depuis deux ans que je fréquente Thierry et je l'en tiens en grande partie responsable.
J'avais confiance en lui et voilà où j'en suis : interdite de chéquier et de carte bleue, je n'ai plus un sou vaillant.
Pieds et poings liés, je suis.

Je parviens à tenir grâce à l'alcool et au tabac, mais je n'en mène pas large, avec un papa Alzheimer et un fils schizophrène.

Thierry veut me restreindre l'alcool et parle d'arrêter de fumer à la rentrée.
Il s'intéresse à ma santé ?
Qu'il ressuscite mon père ! Qu'il sauve mon fils !
Qu'il me paie un bel appart, joli et neuf !
Qu'il me retrouve ma carte bleue et mon chéquier, cachés où sait pas où !
Je n'ai même plus de zic sur mon ordi, je n'ai même plus Deezer !

Mon seul réconfort dans cette tourmente est d'envisager mon proche déménagement, entre septembre et Noël.
Je vais passer d'un quatre pièces à un trois pièces, puisque mes deux fils partent.

Mat s'est enfui il y a déjà deux ans et Sim se tire à la rentrée.
Je commence très bientôt à visiter des trucs à Courbevoie.

(Mat est parti mais ça ne lui a pas vraiment réussi... Deux mois voire davantage qu'il croupit à l'hosto).
(J'ai mal).

A Courbevoie, le marché est riche, plusieurs propositions sont magnifiques, des quatre pièces refaits neufs ou ultra modernes, 30% moins chers que mon quinzième !

Après un bon dîner à la maison, Thierry m'a proposé un verre dehors.
Le calme de la plage m'a rassérénée.
Le vin aussi.
Malgré l'heure tardive, un groupe de petits gosses jouait sur le sable, à marée basse.
On voyait de loin les lueurs des lampions, de Deauville d'un côté et de Villers/s/mer de l'autre.
Joli, festif et gai.
Mon moral remontait, comme la mer, à mesure que nous discutions.
Thierry s'est montré diplomate, gentil.

Sitôt rentrés, Marie restée at home (je ne tiens pas à l'impliquer dans toutes nos histoires scabreuses de couple) m'a proposé une partie de ballon dans le jardin.
OK, avec plaisir.

On a bien rigolé et je me suis endormie sereine, entre drap house et drap du dessus.
En revanche, aucune envie de faire l'amour
(Ce qui pourtant, ne me ressemble guère).

Lundi J3

Réveillée dès 6 du mat après une nuit plan plan, je laisse mon fiancé au lit pour bouquiner seule dans le salon.
Puis me recouche vers 9 du mat, Thierry roupille encore.
Je ne l'entends pas se lever un peu plus tard. Il m'apprendra qu'il faisait particulièrement beau à 10 heures, ce lundi.

Marie dort encore lorsque nous partons acheter, ensemble et main dans la main, le petit déjeuner.
Le ciel dégagé, le temps s'annonce ensoleillé, même si le fond de l'air reste cependant frais.
La balade m'ouvre grand l'appétit et je dévore une brioche, une tartine beurée et une biscotte/café.
Incroyable !
J'suis contente : mon régime grossissant démarre bien.

Nous nous rendons tous les trois à la plage après le p'tit dej de Marie.
Le soleil commence à taper, le drapeau de la mer est vert, les vagues se sont calmées (dommage), l'eau salée est glacée.
Rien que d'y mettre l'orteil me décourage d'y plonger le reste. Et pis, j'me sens flémaga aujourd'hui, je décompresse (les valises, le voyage, le dépaysement..)
Je préfère lire sur mon transat et laisser ma fille et mon jules jouer au ballon dans l'eau.

Jusqu'au repas, je les vois à peine, mon transat orienté vers le soleil me place dos à la mer. Dommage, ils ont l'air de bien s'amuser, dommage de rater ça, mais si je veux bronzer...

Au Key West, à treize heures, nous dévorons.
Frites/mayo pour Marie, copieuse salade maïs/crudités pour Thierry, copieuse salade, chèvre chaud/crudités pour moi.

Pourquoi ?
Pourquoi mon fils ne sort-il pas de moi ?

Pourquoi j'y pense toujours, pourquoi je le vois ?
Si chétif dans son pyjama.
Pourquoi j'y pense à ce point là ?
Mon fils chétif dans son pyjama
Et ses murs blancs
La mer est belle, la mère défaite...
Ah mon amour
J'ai pas le droit, pas le droit de profiter, te sachant interné.

Oh mon amour si tu savais combien je t'aime
Et combien douloureuse, ma peine.

Malgré le soleil, le fond de l'air reste frais.
La faute au vent sans doute.
Plutôt que de squatter de nouveau la plage, nous décidons de visiter la ville, à pied.
Le mini golf de Blonville nous intéresse plus particulièrement. Situé à cinq minutes de notre maison, il s'avère décevant.
Rien à voir avec celui, magnifique, de Deauville !
Dix-huit trous en sol plat, de petits parcours minables sans la moindre déco. Il ne tente ni à Marie, ni à moi.
Pour un euro de plus par personne (5 au lieu de 4), celui de Deauville est vachement plus ludique :
Des descentes et des montées, sur des parcours très colorés, très fleuris, des constructions type Playmobil (châteaux-forts, ponts, murailles, tonneaux...)
Y'a pas photo : la classe !

C'est pourquoi je ne pige pas la réflexion de Thierry, très agressive :
"On va pas encore se taper un trajet à Deauville, juste pour jouer au mini golf !"
Ben si.
Moi, à celui de Blonville, j'y jouerai pas, il ne présente aucun intérêt.
Marie aussi serait très déçue, maintenant qu'elle a vu celui de Deauville.

J'avoue que Thierry m'énerve passablement, par moments, depuis que nous sommes ici.
Je le trouve contrariant, pas cool.
J'en veux pas, de son mini golf à Blonville, il est merdique !

De même qu'il ne m'imposera pas de me sortir de ma boîte dès dix du mat !
Si je n'ai pas fini ma nuit, non mais sans blague !
J'suis en vacances, je fais ce que je veux !
Il m'énerve, il m'énerve, à vouloir ainsi tout régenter !

("Demain, on se balade dès dix heures, le ciel est magnifique.."
"Et si j'ai encore envie de DORMIR, MOI ?")

J'avoue qu'il a de belles qualités :
Il est beau, classe, épicurien, malin, vif, sensible, attentif, sensuel, bon amant (très bon amant), viril, sportif, optimiste, joyeux et gentil beau-papa...
Et il écoute, et il console, et il caresse mes épaules décharnées...
Il est géant.

Mais pourquoi me donnerait-il des ordres ?

"Tu vas faire çi"
"Tu vas faire ça"
"Tu viens par ici"
"Ne fais pas ça"

Ah, il me saoule Yalatollah !

Sa réflexion sur le minigolf de Deauville me coince. D'autant qu'il ADORE cette ville.
Juste pour me contrarier, alors ?
Ben c'est gagné !

Je ne l'accompagne pas rechercher nos affaires sur la plage (le ballon a disparu), et préfère rester à l'intérieur, tandis qu'il joue avec Marie, dans le jardin, au "racket ball".

Je tente vaguement de prendre un cliché d'eux à l'oeuvre, mais y'a trop de vent.
Et pis, il m'a trop énervée.
J'ai besoin de retrouver mon calme, au chaud, seule avec mes bouquins.
Je m'isole donc pas mal de temps. Trois heures pour être exacte.

D'jà 19 heures !

J'en reviens pas !

On va bientôt passer à table, alors ?
SUPER !
J'ai vachement faim.

Et la bouffe adoucit les moeurs.

Effectivement, la préparation du dîner s'effectue dans la plus parfaite harmonie.
Il prépare des oeufs/coq/mouillettes pour Marie et lui. Je concocte quelques salades, laitue, tomates, concombre.

Après ce bon repas, soirée télé dans la bonne humeur. Au programme: "Les aventuriers", avec Delon et Ventura.

Tellement dans la bonne humeur qu'après, Marie confortablement installée dans son dodo,
Thierry et moi,
On baise.
(Et plutôt bien).

J4, mardi

Me réveille à 13 h 30.

Glande at home puis départ pour Deauville (son fief), direction le minigolf (my space).

L'ambiance est gaie, les nuages se dissipent, le ciel s'éclaircit, le soleil pointe son nez.
Sitôt arrivés, nous commençons par nous attabler au "Bar de la plage", sur les planches.
Spaghetti bolognaises pour Marie, steack tartare pour Thierry et moi. Mhummmm !
Le minigolf est super chouette, je l'ai déjà dit (cf photos) et on s'y amuse comme des oufs.
Marie m'étonne car elle fait de très bons coups, elle obtient même certains parcours en deux fois, mais bien évidemment, Thierry gagne et j'arrive bonne perdante.
No problemo, je me suis éclatée, nous avons pris de jolies photos, tout sourire sous le soleil qui tapait dur.
A 17 heures, fin de la partie, en nage, je crève de soif et propose à Thierry une halte rafraichissante, qu'il accepte.
Mais la petite s'insurge : elle tient à rentrer au plus vite pour se baigner à Blonville.
Et mon con de mec va dans son sens : "Faut profiter, faut profiter de la mer !"

Quel culot ! S'en fiche de me laisser crever de soif alors ?

Si mes calculs sont bons, on ne sera pas rendus avant 17 h 45, le temps de se changer, j'envisage le premier plongeon à 18 h et le dernier à 18 h 30.
Bien la peine de se saler, de se presser après la douche pour les courses du soir, pour trente petites minutes d'ablutions nautiques !

Mon pot me file donc sous le nez, j'enrage dans la Polo, sub claquante, déshydratée, limite aphone, j'enrage à haute voix aphone :
Toujours prêt à me contrarier, ce mec !

Verra bien quand ses couilles seront pleines, moi, j'aurai sommeil !
Comme dirait M'ame Michu "On n'attrape pas les mouches avec du vinaigre."

Le plus drôle, c'est qu'une fois à Blonville, mademoiselle la chieuse (ma fille) ne souhaite plus se baigner... Et s'isole dans sa chambre.

Je m'enfile deux litres de flotte bien méritée mais la soirée qui s'annonce ne me dit rien qui vaille.

Pourtant, elle s'est très bien passée.
Au-delà de toute espérance.
Thierry a dressé la table après de rapides courses d'intempérants (vin et tabac) puis il a cuisiné un couscous pour Marie et lui.

Moi, je boudais, hors de question que j'aide ("On attrape pas les mouches avec du vinaigre.")
Au programme : soirée télé "Desesperates housewifes" et "Mon incroyable fiancé."

Puis mon homme s'est couché, canné, et on s'est matté, Marie et moi, les photos prises sur le Nikon de Thierry, depuis le début de l'aventure.

Ah la marrade !
Nos tronches de cake !
Pliées en deux qu'on étaient, ma fille et moi !
Ah les tofs de vacances !
La famille Fenouillard !

J'en ai oublié, l'espace d'une heure, mes soucis financiers, la banquière et mes impayés, le bordel de mon appart, son insalubrité, ma pauvre santé (qui s'améliore, je bouffe à donf et ne tousse plus) et surtout, surtout...
J'en ai oublié que mon fiston chéri Mathieu croupissait à l'hosto.

Mercredi J5

Aujourd'hui, le soleil commence à taper dès 11 heures et ne cessera de chauffer jusqu'à la tombée du jour.

Marie et Thierry filent se baigner tandis que je préfère lire dans notre jardinet, seule et tranquille.
Vers midi trente, je les rejoins à la plage.
Super ! les vagues du petit bord rivalisent de vitalité !
Je me promets d'en profiter sitôt notre déjeuner englouti, au "Bar de la plage".
Marie se contente de commander deux boules de sorbet/coca, Thierry et moi nous régalons de croque-messieurs, lui, "Madame", moi, "Monsieur" et pichet de rosé.

Café et on y retourne (se baigner).

Ah quel bonheur, ces vagues !
Impossible de résister à leur puissance, et si je ne bois pas la tasse, mon corps gracile roule volontiers sur les galets du petit bord.
Marie et moi nous en donnons à coeur joie, fou rire garanti.
Bronzette ensuite, le soleil brille de tous ses feux, "il faut en profiter".

Car le temps est très changeant à Blonville.

Thierry s'endort sur son transat, Marie et moi bichons : nous bronzons à vue d'oeil, elle est déjà, à 18 heures, toute caramel.

Après la douche, à la maison, je constate que je suis plus que brune, mais uniquement de face.
Mon pile est resté blanc, la faute au transat, j'ai l'air d'une tranche de pain de mie toastée d'un seul côté !
Quant à Thierry, il est brûlé des genoux, des mollets et surtout des pieds, rouge enfer !
Sept heures soleil plein feux, ça paie, nous allons rentrer NOIRS !

Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si Thierry, égal à lui-même, m'évitait l'une de ses petites phrases assassines :
"Où est le briquet ? s'exclame-t-il en farfouillant dans mon sac.
Tu l'as perdu ?"
- Ben non, j'viens d'allumer une clop...
-Ben je ne le retrouve pas ! MOI, LE BRIQUET, je le mets TOUJOURS DANS LE PAQUET DE CLOPS !
(Sous-entendu : "Toi, tu fais rien comme il faut!"

Fumasse, je retrouve le-dit briquet en trois secondes, dans mon sac de plage, entre la crème solaire et mon maillot de rechange.
Encore une réflexion désagréable à mon encontre ! Encore un procès d'intention !
Oh, oh, il me fatigue, ce type !

Il me gonfle, ce Yallatola, après ces ydilliques heures de béatitude, de satisfation totale au bord de la mer !
Réellement l'art de tout gacher !

Mon sang ne fait qu'un tour, je plie bagage et rentre at home, avec ma fille mais sans lui.
JE BOUDE.
Un rapide détour au tabac, au bazar, nous achetons des clops et des revues, puis la douche.

Il arrive à ce moment-là mais je n'ai pas décoléré.
Qu'il fasse les courses du diner seul !

Je ne passe pas à table en même temps qu'eux : omelettes confectionnées
de ses blanches mains (rouges) : nature pour Marie-Kate et jambon pour lui.

Par bonheur, le programme télé s'annonce plaisant : les épisodes 3 et 4 de la série du mercredi "Petits meurtres en famille", d'après les romans d'Agatha Christie.

Thierry se montre charmant, serviable, repanti, il implore mon pardon :
"Je suis souvent de mauvais poil quand je me réveille".

OK, OK, passons à autre chose.
Nous nous badigeonnons de crème après-soleil, avant le dodo bien mérité.

Nuit sans rêve, sans coït, mais sans réveil intempestif.
Nos coup de soleil ne sont pas douloureux.

Je pense à Mathieu.

Jeudi J6

Thierry, comme d'hab, se réveille avant moi. Je ne l'entends pas sortir du lit.
Il se charge des courses du soir car nous déjeunons dehors.

Entre deux coups de plage (sauf que j'y vais pas), un p'tit resto sympa, le temps n'est pas ter ter, il vente sur la ville.
Pizza à l'ail pour moi, menus pour eux : entrée, pizza, dessert.
Puis nous passons l'après midi à jouer au Scrabble, une longue partie d'au moins deux heures.
Thierry gagne comme d'hab et je me retrouve bonne perdante, comme d'hab.
No soucy, j'y mets pas mon honneur, j'adore jouer au Scrabble, même si je perds.

On s'en refait deux autres, Marie et moi, je ne sais plus qui gagne, je joue pour jouer, pas pour gagner (j'ai dû gagner).
Quoique pas sûr, j'ai pas fait attention.
Thierry, il a la rage, il est pénible derrière ses pions, faut qu'il nous batte ABSOLUMENT et il est franchement débandant.

Diner, télé, "Le grand pardon II" qu'ils regardent ensemble, Marie et lui, tandis que je préfère m'isoler pour lire et écrire dans ma chambre.
Lorsque Thierry m'y rejoint, je n'ai pas du tout sommeil, alors avec Marie, qui n'a pas non plus sommeil, on joue à la coiffeuse : je me coupe les cheveux courts, elle se charge d'égaliser la nuque.
C'est super ! Ca me va terrible !
Ma touffe sur les photos des journées précédentes ne me convenait pas.
Je me sens toute légère, ainsi dégarnie, et mon visage a dégonflé. A cause des coups de soleil, il ressemblait à celui de Peggy la cochonne, mais ce jeudi nuit, il a repris allure humaine.

Le jour se lève

Le jour se lève
J'ai pas la crève
J'ai pas grossi
J'ai pas minci
Je me relève.

Mes bébés dorment
Je vois les ormes
De mon jardin
On est demain
Main dans la main.

Mon homme ronfle
Mon bidon gonfle
Je mange bien
Et je tousse moins
Je me relève.

Le jour se lève.

J'ai pas de cancer
J'PENSE À MON PÈRE
A MON GAMIN

Moi, ça va bien...

LE JOUR SE LEVE.

Je ne sais plus lequel, cette nuit-là, s'est endormi le premier.
No coït, no calin.
Quelques essais de sa part, je sens, par moment, parcourir de sa main, doucement, mon corps brûlé.
Je m'éloigne aussi sec.
Si je persiste à trouver mon amoureux sexy et galant, il m'énerve pas possible.

Pas envie de l'aimer, pas envie de le séduire, pas envie de lui faire l'amour.

Je ne suis pas à Blonville, mais dans ma tête et je pense à Mathieu, et à mon père aussi, et à mes dettes et à la rentrée qui s'annonce difficile, vu mes dettes et mes impayés.
J'veux bien jouer à la Barbie, mais j'ai mes tranches horaires. La nuit, j'écris ou je dors, quand j'y parviens.

Je préfère qu'il vive sa vie sans moi, ici comme ailleurs. J'ai besoin d'énormes plages de liberté.

J'ai beaucoup vieilli en deux ans, je n'avais pas ces rides immondes au coin des yeux quand je l'ai rencontré.
Je n'avais pas non plus trop de dettes et ma banque m'avait à la cool.

Aujourd'hui, je me trouve laide, maigre des cuisses et des bras, avec un p'tit bidon.
Affreuse, en somme.
Bronzée, mais moche.

Et orpheline de père et de fils et privée du vital : mon chéquier et ma carte bleue.

Bon Dieu, SAUVEZ WILLI !!

Comment vivrai-je sans Thierry ?

Comment mange-t'on, boit-on, lisont, dormont dans un vrai lit, sous un VRAI toît ... Sans carte bleue ni chéquier ?
Je dispose cependant de 1600 euros de revenus mensuels (mes rentes) mais comment m'en servir sans carte bleue ni chéquier ?

La BNP m'a coupé les vivres. Mame TrucBidule.
Alors je me sens piégée.
Obligée du couple.

Pas que Thierry soit pire qu'un autre (sauf sur son sionisme qui me débecte).
Mais le principe m'effraie :

Faut vachement avoir confiance pour miser TOUT sur le Même Cheval !
L'aime-je assez ?
Suis-je capable d'aimer un homme dont je suis totalement dépendante ?

Vendredi J7

Pas de p'tit dej ce matin pour moi, je n'ai pas faim.
Thierry se charge du réveil du Marie jusqu'à ce que je pointe mon nez hors des draps.

De bonne humeur car je trouve ma nouvelle coupe de cheveux très chouette.
Vachement bronzée de face et de profil, vachement belle !

Epatée j'suis !

Le soleil commence à poindre mais pas au point de se rendre à la plage.
Alors, Marie et moi, disputons deux longues partes de scrabble, dans la bonne humeur.

J'adore jouer avec elle. On s'entraide, on se montre nos lettres, et même qu'on s'en échange au besoin.
On ne joue pas compet, juste pour le plaisir.